vendredi 30 janvier 2015

Le Bárðabunga 2014-2015


En tombant sur cette image qui a fait le tour des réseaux sociaux (enfin des miens tout du moins), je me suis dit que ça valait bien un article.
Vous aurez bien entendu reconnu une vue satellite de l'Islande, prise le 19 Janvier et qui montre l'île entièrement recouverte par une couverture de neige. C'est beau n'est-ce pas ? Mais vous avez sans doute remarqué ces deux taches noires qui percent le linceul blanc. La plus à l'ouest (gauche de l'image) n'est autre que le lac de Þingvallavatn, plus grand lac naturel d'Islande (84 km²). La seconde est une coulée de lave, issue de l'éruption du Bárðabunga (84.6 km²) en cours depuis le 29 Aout 2014.

> Image de la fissure volcanique du Bárðabunga.

Topographie du Bárðabunga
Le Bárðabunga est un volcan d'Islande, second sommet du pays, il culmine à 2010 mètres d'altitude et est situé sous le Vatnajökull, principal glacier du pays, grand comme la Corse et visible sur l'image satellite (la partie renflée et lisse située au sud de la coulée de lave sur l'image satellite). Il appartient à un complexe volcanique bien plus important composé d'un réseau de failles volcaniques s'étendant sur 190 km de longueur et 28 km de largueur. C'est dans l'une de ses failles, dans la région du Holuhraun que se déroule l'éruption.

> Carte présentant en vert les coulées et téphras associés aux éruptions du système volcanique du Bárðabunga. 1 - Emplacement de la coulée actuelle. 2 - Emplacement du Bárðabunga stricto sensu.

Historique de l'éruption
Les prémices de cette éruption ont été détectées par l'accroissement progressive de l'activité sismique sous le volcan. En 2011 déjà, le regain d’activité avait inquiété la communauté, le souvenir du Eyjafjöll étant bien présent et le Bárðabunga étant potentiellement plus dangereux. C'est finalement le Grímsvötn, situé un peu plus au sud, qui est entré en éruption, provoquant une pluie de cendres atteignant Reykjavik la capitale. A la suite de cet événement, l'activité sismique est rapidement repartie à la hausse, jusqu'au mois d'août 2014, où on a pu dénombrer (quand c'était encore possible de les distinguer les unes des autres) jusqu'à 2600 secousses par jour. A cette période, les scientifiques ne pouvaient que proposer 3 scénarios plausibles quant à la suite des événements, sans certitude. Soit la remontée d'une colonne de magma (dyke) atteignait une fissure sous le glacier, provoquant un panache de cendre (beaucoup plus important que pour le Eyjafjöll) et des Jökulhlaup, soit le magma continuait sa route vers le nord et émergeait au delà du glacier, provoquant une éruption effusive de moindre importance, soit il s’arrêtait de progresser et l’activité sismique allait décroitre. C'est la seconde hypothèse qui s'est révélée être confirmée.
> Propagation de la coulée de lave, au nord du Dyngjujökull entre le 31/08/2014 et le 06/09/2014


L'éruption démarra donc le 29 août et est toujours en cours. Entre le 30 décembre 2014 et le 15 Janvier 2015, le flot de lave est estimé à 100 m3 par seconde en moyenne. Au plus fort on atteignait les 1000 m3 par seconde, loin des débits du Laki en 1783, mais tout de même impressionnant si on le compare au débit moyen de l'Etna, volcan bien connu, qui crache en moyenne 1 à 2 m3 par seconde. De nombreux petits séismes sont mesurés chaque jour, témoin du mouvement souterrain du magma (environ 20 pour la journée du 29 Janvier, dont le plus fort à 20h33, Magnitude 4.3) et qui n'annonce pas un arrêt prochain de l'éruption. Depuis pratiquement le tout début de l'éruption, les géologues ont établi les trois scénarios les plus plausibles quant à la suite des événements :

1 - L'activité décroit doucement jusqu'à l'arrêt de l'éruption. Cela peut prendre plusieurs mois.
2 - La fissure éruptive se propage plus au sud, sous le glacier Dyngjujökull, provoquant une éruption explosive avec libération de cendres et un Jökulhlaup.
3 - La subsidence (affaissement) du cratère du Bárðabunga se poursuit et provoque une éruption majeure, avec des retombés de cendres importantes et un Jökulhlaup destructeur.

> Progression de la coulée de lave
Conséquence sur l'atmosphère
Même si les quantités de lave font de cette éruption la plus importante d'Islande depuis le Laki, son débit modéré et sa faible explosivité n'ont pas eu beaucoup de conséquences pour l'Homme. Mais à son maximum, notamment en Novembre 2014, c'est près de 60 000 tonnes de SO₂ qui étaient rejetés chaque jour dans l’atmosphère, provoquant une dégradation de la qualité de l'air à l'est de l'Islande. Une partie du SO₂ a atteint la France, mais dans des proportions peu significatives.
Vous pouvez consulter la dispersion des gaz ici : http://en.vedur.is/weather/forecasts/gas-model/

> Projection d'un nuage peu épais au dessus de la fissure volcanique
 Autres éruptions dans le système volcanique du Bárðabunga 
Par le passé, deux éruptions majeures dans le complexe du Bárðabunga sont à noter :
- L'éruption effusive la plus importante, celle de Þjórsá (-6800 avant JC) avait recouvert environ 900 km² par plus de 20 km3 de lave, plus importante éruption lavique de l'Holocène (plus fort que le Laki et ses 15 km3.
- Une éruption explosive dans la fissure du Veiðivötn, au nord du Landmannalaugar a projeté 10 km3 de Téphras affectant 50 % du territoire islandais en 1477.
Mais c'est environ 400 éruptions qui ont été découvertes, dont l'essentiel (87%) est de type basaltique explosive (phréato-magmatique) puis pour 10 % des cas, basaltique effusive et quelques rares éruptions associations d'un mélange entre basalte et un magma plus riche en silice.
> Une petite dernière juste pour le plaisir.

N'hésitez pas à repasser, je mettrais à jour l'article en cas de changement important, où si la coulée de lave continue à bien s'étendre.

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 Sources :
http://en.vedur.is/earthquakes-and-volcanism/articles/nr/2947
http://en.vedur.is/earthquakes-and-volcanism/articles/nr/2949
http://earthice.hi.is/bardarbunga_2014
http://en.vedur.is/media/jar/Bardarbunga_kafli20140825.pdf

dimanche 11 janvier 2015

[Top 5 : Eruptions volcaniques majeures] Conclusion

Récapitulatif du Top 5 :

Numéro 5 - Eyjafjallajökull - 2010
Numéro 4 - Nevado Del Ruiz - 1985
Numéro 3 - Vésuve - 79
Numéro 2 - Krakatoa - 1883 - Tambora 1815
Numéro 1 - Laki - 1783

Conclusion :

Les éruptions volcaniques font parties des manifestations les plus impressionnantes de l'activité interne de notre Terre qui, de tout temps, ont fasciné et terrifié l'homme, et sont à l'origine de mythes et légendes, comme le géant Surtur qui embrasera le monde lors du Ragnarök dans la mythologie nordique et dont le nom est associé aux volcans en Islande (île volcanique de Surtsey, les tunnels de lave de Surtshellir). Mais il est bon de relativiser ces chiffres en les comparant avec d'autres catastrophes naturelles ou non.
> Tunnel de lave de Surtshellir (Caverne de Surtur) dans l'ouest de l'Islande.
© Benjamin Mollier

Depuis l'éruption du Laki en 1783, on estime que les éruptions volcaniques ont entrainé la mort d'environ 250 000 personnes, chiffres comparables au bilan des séismes les plus meurtriers :
Haiti - 2010 (Magnitude 7.0-7.3  sur l'échelle de Richter) : 230 000 morts
Océan Indien - 2004 (Tsunami lié à un séisme de magnitude 9.1-9.3) : 230 000 morts
Tangshan (Chine) - 1976 (Magnitude 7.6-7.8) : 250 000 morts (officiellement)
Shaanxi (Chine) - 1556 (Magnitude autour de 8) : 830 000 morts
On peut également mettre en relation ces chiffres avec la seconde guerre mondiale et ses 73 000 000  de victimes. Ou encore aux morts causées par les grandes épidémies. La peste noire entre 1347 et 1351 qui a emporté entre 40 et 50 % de la population européenne, la variole causant la mort de 300 000 000 de morts pour le seul 20ème siècle...

Les risques liés aux éruptions dépendent de différents facteurs.
- La violence de l'éruption (quantité de magma, échelle VEI) et des phénomènes associés (Nuées ardentes, lahars...) ainsi que la probabilité que ces phénomènes surviennent. On parle de l'aléa lié aux éruptions.
- Les populations potentiellement touchées et leurs réactions face au risque. On parle d'enjeu.
C'est la somme de ces deux facteurs qui établit le risque associé aux volcans, principe également applicable à n'importes quelles catastrophes naturelles. Ainsi, l'éruption du Novarupta en 1912 en Alaska, évaluée à 6 sur l’échelle de VEI et produisant des nuées ardentes, a un aléa élevé, mais un enjeu quasi nul, ayant lieu dans une région non peuplée. Au contraire de l'éruption du Nevado Del Ruiz, d'un aléa modéré, mais meurtrières à causes de la population installée dans les environs et l'absence de réaction des autorités au moment de l’éruption (enjeu très élevé). 
C'est le même constat qui permet d'expliquer la différence entre le bilan du séisme de Haïti (Magnitude 7.0-7.3 - 230 000 morts) et celui au Japon en 2011 (Magnitude 9 - 20 000 morts et disparus principalement liés au tsunami et non au séisme lui même). La population japonaise étant bien mieux préparée aux séismes et bénéficiant d'installations plus solides et adaptées aux risques sismiques.

> Dégâts provoqués par le séisme de Haiti en 2004.


Si on s’intéresse en détail aux éruptions et aux phénomènes associés, on constate des conséquences à court et long terme :
- A court terme - Coulée de lave, Nuée Ardente, Pluie de pierres ponces... (conséquence directe) et Lahar, Tsunami (conséquence indirecte)
- A long terme - Changement climatique (entrainant des famines) lié à la projection de cendres et de gaz dans l'atmosphère.

Si on fait le bilan depuis 1783 de ces 230 000 morts, on obtient cette répartition :


Plusieurs constats apparaissent à l'observation de ce diagramme. Le phénomène provoquant le plus de morts pendant cette période est une conséquence indirecte du volcanisme liée aux modifications du climat. Or ce pourcentage est obtenu avec seulement 2 éruptions (Laki et Tambora), de plus nous avons vu que ce chiffre pour le Laki est sans doute très sous évalué (puisque ne concernant que les Islandais). Ce qui montre que les éruptions mettant en jeu les plus grandes quantités de magma sont potentiellement les plus meurtrières (pas réellement une surprise). C'est pour cette raison que les systèmes volcaniques qui ont par le passé libérés des quantités phénoménales de magma sont très surveillés et font souvent l’objet de scénarios catastrophes, comme le parc Yellowstone, qui lors de ces 3 dernières éruptions il y a 2.1, 1.3 et 0.7 millions d'années a dégagé respectivement une quantité de téphras de 2500 km3, 280 km3 et 1000 km3 à mettre en perspective avec les 110 km3 du Tambora. On peut citer également le "récent" Taupo qui libérait 2800 km3 de téphras il y a 26 500 ans. 
 > L'éruption du Taupo a entrainé la formation d'une Caldeira, remplit maintenant par le plus grand lac de Nouvelle Zelande (616 km2)
On peut également citer, sur des échelles de temps beaucoup plus longues, de véritables complexes volcaniques capables d'extruder des quantités considérables de magma, recouvrant d'immenses surfaces par la lave, formant des régions appelées provinces ignées, ou trapps lorsqu'ils sont sur terre (trapp signifiant escalier en suédois), capables de changer durablement le climat et entrainer des extinctions massives d'espèces sur Terre. Citons en quelques unes pour les comparer avec les supervolcans tels le Yellowstone.

 - La province ignée nord-atlantique, dont l'Islande est la partie émergée, a été surtout active entre 62 et 54 millions d'années et a recouverte une surface de 1,3 millions de Km2 (2 fois la France) par un volume de 6,6 millions de Km3.
- Les trapps du Deccan en Inde, formés lorsque l'Inde est passé par dessus le point chaud de la réunion, débutant il y a 65 millions d'années et qui fut longtemps considérés comme le coupable de l'extinction des dinosaures. 2 à 3 millions de Km3 de laves ont recouvert une surface là encore grande comme deux fois la France.
- Les trapps de Sibérie qui en seulement 1 million d'années ont produit une quantité estimé entre 1 à 4 millions de Km3 et qui pourraient être à l'origine de la plus grande extinction de l'histoire de la Terre, qui a décimé 95% des espèces marines et 70 % des espèces continentales il y a 250 millions d'années (crise entre le Permien et le Trias).

> L'érosion par les glaciers, en formant les Fjords d'Islande (ici Seyðisfjörður), a rendu visible les différentes couches de laves les unes sur les autres (strates) formant en apparence un escalier (trapp). © Benjamin Mollier

Mais derrière ces éruptions ou ces suites d'éruptions potentiellement catastrophiques, il ne faut pas négliger les éruptions plus modestes mais plus fréquentes, qui sur une échelle de temps courte, sont les plus meurtrières. Une nuée ardente n'a pas besoin d'éruptions gigantesques pour provoquer des milliers de morts, les lahars dépendent de la géographie du volcan plus que de l'intensité de l'éruption. Il est donc capital de continuer à bien étudier les volcans et d'évaluer risques pour prévenir et éduquer la population et ainsi sauver des vies.

Sources :

*Volcanologie, 4ed, JM Bardintzeff
*A Stratigraphical Basis for the Anthropocene publié par C.N. Waters,J.A. Zalasiewicz,M. Williams,M.A. Ellis,A.M. Snelling 
*Geochemical Fingerprinting of Volcanic Airfall Deposits: A Tool in stratgraphic correlation Par Soumava Adhya
*Microtextural analysis of the 934 A.D. Eldgja and 1783-84 Laki tephra: patterns of vesiculation and fragmentation for explosive basaltic eruptions : B. Sellers , B.F. Houghton , T. Thordarson
*NEAR AND FAR-FIELD EFFECTS OF TSUNAMIS GENERATED BY THE PAROXYSMAL ERUPTIONS, EXPLOSIONS, CALDERA COLLAPSES AND MASSIVE SLOPE FAILURES OF THE KRAKATAU VOLCANO IN INDONESIA ON AUGUST 26-27, 1883 - George Pararas-Carayannis
*Magma volume, volatile emissions, and stratospheric aerosols from the 1815 eruption of Tambora S. Self,1 R. Gertisser,1 T. Thordarson,2 M. R. Rampino,3 and J. A. Wolff4

*http://earthice.hi.is/eruption_eyjafjallajokull_2010
*http://planet-terre.ens-lyon.fr

vendredi 9 janvier 2015

[Top 5 : Eruptions volcaniques majeures] Numéro 1...

... 1 - Lakagígar (Laki) - 1783


Laki
Éruption de 1783
Localisation Sud de l'Islande
Type d'éruption Effusif
Lave Basalte

Échelle VEI (/8) 4
Volume de Magma 15 Km3
Volume de Téphras 0.9 Km3

Bilan 10000 morts
Cause Gaz


Le Lakagígar n'est pas un volcan, mais une fissure de 27 km de long et composée d'une centaine de cratères (Lakagígar signifiant les cratères du Laki) qui ont libéré en 1783 une quantité considérable de lave, 12 à 15 Km3, ce qui en fait l'un des trois plus grands épanchements de lave de l'histoire humaine (époque holocène), les deux autres ayant eu lieu à Eldgjá (en 934 après JC) et Þjórsá (-6800 avant JC), tous deux situés... en Islande évidemment. Le point culminant de cette fissure est le Laki, dont on associe en général le nom à cet événement. 

Si cette éruption est moins importante, que ce soit en terme d'explosivité (évidemment puisqu'il s'agit d'une éruption effusive), de magma extrudé (deux à trois fois moins), ou de morts provoquées, par rapport au Tambora, elle détient son lot de records et a eu un impact beaucoup plus fort sur nos sociétés européennes, ce qui en fait l'une des plus fascinantes à étudier.

Une première courte phase de l'éruption eu un caractère explosif, classée d'une intensité de 4 sur l'échelle VEI expulsant 0.9 Km3 de téphras, soit un peu moins que l'éruption du Eyjafjöll, avant de prendre un caractère totalement effusif (VEI 0) par la suite. Mais c'est dans la quantité de lave émise que cette éruption prend un caractère exceptionnelle, une surface de 565 km2 étant recouverte de 15 Km3 de lave. 


 > Coulée du Laki recouverte par la mousse. "La vie trouve toujours son chemin" Dr Ian Malcolm

L'éruption en elle même, ayant eu lieu dans les hautes terres désertes d'Islande, n'a provoqué aucune victime directe. Mais en plus des immenses quantités de lave éjectée, l'éruption a entrainé la libération de gaz toxiques et de cendres. L'été 1783 est notamment connu comme l'été de sable, à cause des nuages de cendres retombant sur le Royaume Uni. On estime à 8 millions de tonnes la libération de Fluorure d'hydrogène, qui empoisonna la terre et provoqua la mort de 50 à 70 % du bétails élevés en Islande, entrainant une famine importante. C'est également pas moins de 120 millions de tonnes de dioxyde de sulfure qui furent dégager dans l'atmosphère se transformant en 250 millions de tonnes d'acide sulfurique (2,5 fois plus que pour le Tambora) formant un nuage recouvrant l'Europe et une partie de l'Amérique du nord, appelé Brouillard du Laki. Entre les famines et la toxicité du brouillard du Laki, cette éruption a provoqué en réalité plusieurs dizaines de milliers de morts, mais il est très difficile d'en donner un chiffre précis, n'ayant provoqué que des morts indirectes et n'étant pas le seul facteur entrant en jeu dans certaines d'entre elles. En Islande, environ 25 % de la population périe par empoisonnement ou de famine (environ 10 000 personnes). En France et en Angleterre, c'est une augmentation de 35 à 40 % de la mortalité qui a été constatée lors de l'été 1783.


> Graphique présentant le taux de surmortalité pendant l'été 1783 en France, par rapport à la mortalité moyenne de 1774-1789.

Nous remarquons ici, malgré le caractère effusif de cette éruption, que le dégazage dans l'atmosphère et donc les conséquences sur le climat furent plus important que pour le Tambora, bien que nous disposons de données moins fiable que pour la catastrophe indonésienne. Le brouillard du Laki entraina tout d'abord pendant l'été une hausse de la température, puis au contraire, la présence très importante d'aérosols (fines particules en suspension dans l'air) dans l'atmosphère provoqua un hiver particulièrement rude marqué par des gelées très importantes. Nous savons que ces importants dégazages dans la haute atmosphère peuvent entrainer des modifications sur plusieurs années du climat, même si il est ici difficile d'établir à quel point le Laki a été responsable des conditions climatiques extrêmes que subirent les européens (hiver très froid et périodes de sécheresses importantes) qui causèrent famines et épidémies, rendant la vie particulièrement difficile ces années là, jusqu'à la révolte des paysans français en 1789 !



jeudi 8 janvier 2015

[Top 5 : Eruptions volcaniques majeures] Numéro 2...

... 2 - Krakatoa - 1883 et Tambora - 1815

Et oui, je suis un arnaqueur, il n'y a pas 5, mais bien 6 éruptions majeures dans mon classement. Je place ces deux ensembles, car elles sont les deux plus meurtières de l'histoire, et qu'elles ont eu lieu dans le même pays, en l'occurence l'Indonésie (Vous avez dit poissard ?).

Commençons par la plus récente :



Krakatoa
Éruption de 1883
Localisation Indonésie
Type d'éruption Explosif
Lave Dacite

Échelle VEI (/8) 6
Volume de Magma 9 km3
Volume de Téphras 20 Km3

Bilan 36500 morts
Cause Tsunami

Les restes du volcan détruit en grande partie lors de la dernière éruption forme un archipel de 4 îles entre les îles de Sumatra et Java en Indonésie. L'éruption  de 1883 est classée à l'indice 6 sur l'échelle VEI. Il s'agit de la plus puissante éruption depuis celle du Tambora. Seules 3 éruptions - Pinatubo (1991), Novarupta (1912) et Santa Maria (1901) - ont atteint cet indice depuis, mais les conséquences furent bien moins graves.

La violence de son éruption est du au caractère explosif de sa lave très visqueuse (Dacite), mais également à l'hydratation du magma par l'eau de mer, notamment lors de la principale explosion lorsque la destruction partielle du volcan a permis à l’océan de s'engouffrer en partie au cœur du volcan. Le son énorme engendré par ce phénomène est considéré comme le plus violent bruit de l'histoire humaine, s'entendant à un rayon de plus de 4000 km.

La 4ème explosion, au niveau de la mer, à provoqué un important glissement des flancs du volcan, ainsi que l'effondrement sous son propre poids de la paroi de la caldeira suite à la vidange de la chambre magmatique entrainant la formation d'un Tsunami qui s'est abattu sur les côte de Java et de Sumatra, atteignant par endroit une amplitude de 37 m, ravageant 295 villes et villages entrainant la mort de 36500 personnes.

Son éruption a projeté environ 20 km3 de téphras, et de nombreux gaz qui ont entrainé une diminution de 10 % des rayonnements solaires et une diminution globale de la température de 0.4 °C pendant 3 ans sur une majorité du globe.


 > Animation sur l'évolution de l'archipel du Krakatoa montrant tout d'abord la destruction de l'île principale par l'éruption puis l'émergence d'une nouvelle île formée par la croissance d'un nouveau volcan le Anak Krakatoa (l'enfant du Krakatoa).


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Tambora
Éruption de 1815
Localisation Indonésie
Type d'éruption Explosif
Lave Trachy-andésite

Échelle VEI (/8) 7
Volume de Magma 30-33 Km3
Volume de Téphras 110 Km3

Bilan 90000 morts
Causes Nuées ardentes + Gaz



Cette éruption aurait très bien eu sa place en première position, car elle est celle de tous les superlatifs. La plus meurtrière, la plus puissante, la plus destructrice de l'histoire humaine. Mais pourtant, sa seule "faiblesse" est d'être située dans une région de la Terre qui à cette époque, n'était pas réellement le centre du monde, si bien qu'elle reste assez méconnue.

En 1815, le Tambora entre en éruption en libérant une quantité considérable de magma, estimée dans un premier temps à 50 km3, puis revue à la baisse, entre 30 et 33 km3, ce qui reste et de loin, le plus gros volume de magma extrudé (sortant du volcan) lors d'une éruption volcanique dans l'histoire de l'humanité. Ce magma à été projeté sous forme de téphras pour un volume de 110 km3 (échelle VEI=7), là encore un record. Soit une énergie estimée à 1.4x10^20 J soit 2 millions de fois plus que l'énergie libérée par le bombardement d'Hiroshima. Il faut remonter à 1600 avant JC et l'éruption minoenne (sur l'île de Santorin) pour retrouver un événement volcanique de cette ampleur, même si ici les données sont évidemment moins précises et les conséquences bien plus difficiles à évaluer.

Cette éruption de type Plinienne a connu des épisodes similaires à l'éruption du Vésuve, mais dans des proportions bien plus importantes avec l’élévation d'un panache de cendre à 44 km de hauteur, une pluie de pierre ponces puis une nuée ardentes firent plus de 12 victimes (comme évoqué dans l'article précédent, la Montagne Pelée a le malheureux record de la nuée ardente la plus meurtrière).

Cette éruption à également laisser s'échapper des quantités colossales de gaz volcaniques (cependant un peu moins que notre numéro 1...), avec comme estimation environ 53 à 58 millions de tonnes de dioxyde de souffre qui dans l'atmosphère se sont transformés en environ 100 millions de tonnes d'acide sulfurique, responsable de pluies acides et d'une baisse significative des températures (1 à 1.5°C l'été suivant, 1816 étant connu comme l'année sans été) sur une partie de la Terre, responsable de famines (causant la mort de 80 000 personnes).

A la suite de cette éruption, la chambre magmatique vidée d'une telle quantité de Magma provoqua l'effondrement du Volcan, formant une caldeira de 6 km de diamètres pour 1 km de profondeur réduisant la hauteur du volcan de 1.4 km.

> Photographie de l'intérieur de la caldeira du Tambora.


mercredi 7 janvier 2015

[Top 5 : Eruptions volcaniques majeures] Numéro 3...

...3 - Vésuve - 79




Vésuve
Éruption de 79
Localisation Italie
Type d'éruption Explosif
Lave Phono-tephrite

Échelle VEI (/8) 5
Volume de Magma 2 km3
Volume de Téphras 3.3 Km3

Bilan 10000 morts
Cause Nuée ardente



L'éruption du Vésuve est sans conteste la plus célèbre de l'histoire. Elle marque le début de la volcanologie (l'étude des volcans) avec le récit de Pline le jeune (l'ancien étant mort pendant l'éruption) qui fit la première description détaillée d'une éruption. Son compte rendu fut d'ailleurs utilisé pour caractérisé un type d'éruption explosive que l'on nomme maintenant en hommage, les éruptions pliniennes.

Ce type d’éruption - dont celle du Vésuve est un modèle - est caractérisé par une lave visqueuse (ici de la phono-tephrite), assez riche en Silice qui s'écoule difficilement et reste bloqué au sommet du volcan, bouchant la cheminée et empêchant le magma sous-jacent de sortir. Cela entraine une augmentation de pression, jusqu'à un point critique où le bouchon de lave explose, détruisant parfois partiellement le volcan. 
Pour l'éruption du Vésuve en 79, c'est pas moins de 3.3 km3 de Téphras qui sont émis, soit une éruption évaluée à 5 sur l'échelle VEI, une éruption qualifiée de paroxysmique, dont la fréquence dans l'histoire est en moyenne de une tous les 50 ans. Cette explosion a fragmenté la lave en fines cendres qui s'élèvent en un panache allant jusqu'à 32 kilomètres de hauteur et dont le sommet aplati (Pline l'avait décrit en le comparant au Pin laricio, ou pin parasol) libéra une pluie de pierres ponces et de cendre qui recouvrit Pompéi d'une couche allant jusqu'à 2m80 de hauteur.

 







^ Schéma (à gauche) du panache lors de l'éruption du Vésuve en 79. Photo (à droite) d'un panache lors de l'éruption plinienne du Mont Redoubt (1990) en Alaska.

 
Après environ 20 heures d'éruption, le volcan est passé en mode péléen, nom donné après la description de l'éruption du Mont Pelée en 1902 dont les nuées ardentes restent à ce jour les plus meurtrières de l'histoire (30.000 morts). En refroidissant au contact avec l'air, le panache se densifie et s’effondre sur lui même, dévalant les pentes du volcan en nuées ardentes dévastatrices (appelées surges volcaniques) composées de cendre, de gaz, portés à hautes températures (au moins 400 °C) qui asphyxièrent les habitants d'Herculanum et d'Oplontis, le tout provoquant un bilan d'environ 10.000 morts.

 



^Schéma (en haut) de la phase plinienne à gauche et de la phase péléénne à droite, et leurs dépôts associés (en bas). On remarque le dépôt fin et ordonné formé par la pluie de ponce lors de la première phase, et le dépôt bien plus épais et chaotique associé aux nuées ardentes


Depuis, le Vésuve a connu de nombreuses éruptions, parfois explosives (la dernière date du XVIIème siècle), effusive ou les deux à la fois. Il est encore actif et est l'un des volcans les plus étudiés et surveillés, notamment à cause de la ville de Naples à ses pieds, comptant près d'un million d'habitants.